Bruno Chaplot

J’ai 47 ans, marié avec deux enfants de 10 et 8 ans. Graphiste créatif depuis 2000, à mon compte depuis 2006, j’ai travaillé en agence de communication parisienne, pour des grandes marques, puis le luxe… N’ayant jamais vécu à la mode parisienne, et dégouté de mon quotidien RER/boulot/dodo…. j’ai franchi enfin la peur du changement et quitté la région parisienne en 2013 pour vivre dans le Limousin avec déjà la ferme intention de donner du sens à ma vie et revenir à des choses essentielles, simples, et plus proche de la nature.

En 2018, alors que je préparais un projet de petits « carnets essentiels » pour aider à recoller ou redécouvrir son quotidien, recoller avec des choses simples, l’algorithme de youtube m’a suggéré une vidéo de Pablo Servigne… Puis une d’Yves Cochet, Emmanuel Prados, Vincent Mignerot, Arthur Keller, Jean-Marc Jancovici… Comme vous, une boulimie de vidéos sur l’effondrement. J’avais enfin la réponse à mes interrogations qui me taraudaient depuis des années. Comme un malade qui souffre de symptômes sans jamais savoir le nom de sa maladie, là j’ai eu enfin le mot qui correspondait à mon constat : « Collapse »… Oui notre monde ne pouvait continuer comme ça, on allait dans le mur, mais pourquoi ? comment ? quand ?

Comme beaucoup, j’ai eu envie de partager tout cela avec mes proches et j’ai donc décidé de le faire à ma manière, par le dessin et l’humour. En 2018, j’ai crée les « Collapsonautes », petites planches dessinées humoristiques qui présentent la vie de deux voisins qui aujourd’hui contemplent l’effondrement progressif au jour le jour au travers l’actualité. Mais je propose également une vision de leur quotidien en 2050, où ils vivent en mode frugal dans une France effondrée. Ces deux personnages sont les deux facettes et m’ont aidé à extérioriser les questions, les doutes, les angoisses que j’avais. J’ai rejoint Adrastia à la même époque suite à mes premiers échanges avec Vincent Mignerot.
Cette envie de sensibiliser, d’essayer de faire changer les choses, s’est poursuivi en engagement politique et je suis élu maire adjoint à l’environnement de ma ville de 5200 habitants. Être confronté aux « yaka fokon », aux freins nombreux, aux gens du quotidien, rend humble sur notre capacité à changer et être à la hauteur des défis présents et à venir.

En 2022, je rejoins le CA d’une nouvelle association Transitions Limousines qui se crée et se développe près de moi ; je participe ensuite au Festival de la Décroissance, puis entre en 2024 dans le CA d’Adrastia dont les membres étaient devenus plus que des connaissances et des profils Facebook ou LinkedIn que je commentais.

Aujourd’hui j’essaye toujours d’apporter une réflexion sur ce qui arrive, comment comprendre, comment digérer tout cela sans sombrer psychologiquement. Sans non plus se berner d’illusion ou d’espoirs inutiles mais rassurants. J’oscille entre le stade 4 et le stade 5 de l’échelle de Chefurka, j’ai fini mon premier tour de la courbe du deuil, et je suis serein en acceptation avec ce qui se passe et les difficultés ou possibilités qui se présentent devant nous.
Le projet de cette année est une exposition d’aquarelles sur le thème de la montée des eaux, comme allégorie à notre effondrement ou plutôt notre effritement car je pense maintenant que face aux enjeux de ce siècle, notre capacité à y faire face est relative à chacun. Nous sommes comme des personnes sur une énorme dune, face à l’océan où chaque marée haute, chaque vague, qu’elle soit économique, écologique, sociale, sanitaire, grignote le sable et nous fragilise personnellement et/ou collectivement...

Le tout, ce n’est pas de savoir quand, ni comment nous chuterons, mais de savoir ce que nous feront d’ici là.

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